Télétravailleuse

« Le télétravail c’est la santé, rien faire c’est la conserver. Les prisonniers du téléboulot font pas de vieux os. »

C’est par cette parodie de la célèbre chanson d’Henri Salvador que je débute ce nouveau texte de la période du déconfinement suite à la pandémie de COVID-19. En effet, encore aujourd’hui, nos vies ne sont pas revenues à la normale. Notamment, le travail reste fortement perturbé par les suites de ce virus et les différents protocoles sanitaires mis en place par les entreprises.

Ainsi, depuis la mi-mars 2020, je travaille à distance depuis mon logis. Même si je ne dispose pas de la fibre chez moi, mais juste d’un accès ADSL, je suis bien équipée pour pouvoir télétravailler. J’ai une pièce dédiée qui servait jusque là à mes loisirs artistiques. Je l’utilisais de façon très exceptionnelle pour du télétravail occasionnel. En effet, mon secteur professionnel est bien adapté pour ce dernier. Cependant, je n’ai jamais été adepte de cette forme de travail. J’ai toujours préféré les contacts humains qui sont pour moi un des principaux intérêts du travail. Et comme j’ai été très longtemps manager d’équipes, il m’a toujours semblé nécessaire d’être en proximité de mes collaborateurs, même si ce n’était pas toujours le cas.

A la veille d’une nouvelle étape dans le déconfinement, et après deux mois et demi de télétravail à 100%, une forme qui n’a jamais fait l’objet d’accords dans ma société, j’en profite pour rédiger mon propre Retour d’EXpérience (REX).

Mes avantages :

Le principal avantage, mon activité le permettant, c’est déjà d’avoir pu continuer à travailler pendant le confinement. Lorsqu’on note le grand nombre de salariés qui ont perdu leur emploi, c’est un point très positif.

Comme beaucoup de collègues, je prends plus soin de ma maison. Chez moi la terrasse est belle et bien entretenue avec de jolies plantes bien arrosées dans les bacs. Avoir un joli environnement de travail est un plus.

Je mange ou bois un café en terrasse les jours de beau temps (qui sont assez fréquents). Cela me donne parfois l’impression d’être en WE prolongé.

Je peux recevoir des colis ou faire venir des artisans chez moi sans me soucier d’être là ou pas, vu que j’y suis en permanence.

Je lance des lessives ou range chez moi entre deux réunions, ce qui me laisse beaucoup plus de temps libre les samedis et dimanches.

J’évite les frais d’essence et de perdre du temps sur la route. Mon dernier plein date d’avant le confinement. Alors que je remplissais mon réservoir tous les quinze jours. Mon télétravail est donc bon pour la planète et pour ma bourse.

Du côté des autres dépenses, pas de grands frais de vêtements non plus, ni de coiffeur pendant tout ce temps. Mes cheveux sont plutôt longs à date, mais j’hésite encore à aller me les faire couper. Peut-être vais-je tenter le petit salon du village. Lieu où je n’ai jamais mis les pieds. C’est bien aussi de faire travailler les commerçants et artisans locaux, comme mon petit boulanger.

Mes inconvénients :

La productivité des premiers temps n’a pas été au top. En ce qui me concerne, même si je suis partie avec mon portable à la mi-mars, je n’ai pas pris divers dossiers et carnets qui m’aidaient bien au quotidien dans mon activité.

Le matériel personnel dont je dispose est suffisant, mais il faut reconnaître que je n’ai plus accès à des imprimantes professionnelles qui me permettaient, sans abus, de sortir quelques documents, notamment sur de grands formats, ou d’en scanner certains avant diffusion.

Même si mes colocs ne sont pas difficiles, il m’a fallu faire la cuisine pour eux le midi en remplacement de la restauration d’entreprise.

J’ai été obligée de réaménager mon bureau pour en faire un véritable espace de travail au quotidien. Mes activités artistiques, hormis l’écriture, ont été mises de côté en attendant des jours meilleurs. Il m’a fallu investir dans un nouveau fauteuil plus ergonomique. Et j’ai transformé le grand écran de mon ordinateur privé en un second écran.

A date, après deux mois et demi, il n’a pas été possible de récupérer ni mes cahiers, ni le moindre matériel dans les locaux de l’entreprise. Cette dernière met en place un Plan de Reprise d’Activité particulièrement draconien pour les prochains mois.

Mon employeur n’a pas prévu de nous faire revenir avant, au mieux, le mois de septembre. De ce fait, cela veut dire que nous allons passer les mois d’été à travailler de chez nous. De mon côté, comme pour pas mal de salariés, il va être très difficile de produire en période de canicule. Tout le monde ne dispose pas, loin de là, d’une climatisation.

J’avais des habitudes d’activités sportives, de courses, de médecins ou de garagiste près de mon travail, là c’est plus compliqué pour y aller.

Néanmoins, le principal défaut de ce mode de travail est le sentiment d’isolement qu’il génère. Loin de nos collègues de travail, nous nous sentons parfois véritablement seul. En ce qui me concerne, je regrette surtout les moments de convivialité à la cantine où nous partagions nos sentiments sur l’actualité, nos récits de voyage ou nos impressions suite à un spectacle.

Mes premières conclusions sur le sujet :

Comme dirait un collègue, le boulot a envahi nos vies. Et pour ceux qui n’y prennent pas garde, il est devenu omniprésent, conquérant et les submerge peu à peu. Même si j’ai du adapter un peu mes horaires, avec notamment un début de journée encore plus matinal, j’essaie de bien faire la part entre mon temps privé et mon temps professionnel. J’ai notamment mis en place un rituel sportif en fin de journée afin de pouvoir m’aérer et me bouger un peu.

De plus, depuis une semaine, je me fais livrer des plats diététiques préparés, ce qui me donne une raison pour faire moins de cuisine. Par ailleurs, après le 11 mai, après avoir mis en place mon propre protocole sanitaire, j’ai fait revenir, avec son accord, la dame qui m’aide dans le ménage, et cela me permet d’avoir un peu de discussions avec une personne de l’extérieur autour d’un café (et de gestes barrières).

A l’instar des géants du numérique qui proposent à certains employés de devenir des télétravailleurs permanents, je crains que cette forme de travail ne se développe encore à l’avenir, et que nos entreprises en profitent encore pour réduire leurs coûts de fonctionnement en éliminant le lieu physique de travail. Même si cette évolution est souhaitée par de nombreux salariés parents de jeunes enfants, écolos, logeant assez loin ou simplement confinés de nature, je ne pense pas que la majorité voit d’un bon oeil ce futur.

Il ne faut pas oublier le rôle socialisant du travail. L’homme est un animal social. Il s’épanouit, dans sa majorité, au travers de relations humaines. Nous progressons avec l’aide des autres ou en nous confrontons à d’autres. Nous sommes aussi plus créatifs ensemble que seul. Nous apaisons aussi la dureté de certaines difficultés par des rencontres physiques que ni le téléphone, ni les visios ne peuvent calmer par leur rudesse.

Faut-il donc craindre la naissance d’un monde d’après plus brutal, où le salarié, isolé et sans réel attachement à son entreprise, ruminera ses rancoeurs derrière son clavier ? Nul doute que dans ce nouveau monde, les syndicats seront encore moins présents et les piquets de grève inexistants au grand soulagement de certains. Mais que restera-t-il à ces travailleurs pour s’exprimer vraiment ?

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